Penser en euros? C'est pas facile, mais on y vient!
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«Je regarde en euros et je multiplie par 6, voilà.»

«Pour les petites sommes je pense en euros et pour les grosses en francs français. Tout ce qui dépasse en fait 10 000 francs, voilà, hein, c’est la marge.»

«Je dois avouer que je pense d’abord en francs français. Je fais la traduction.»

«On travaille dans les transports en commun alors c’est vrai qu’on utilise les euros avec les tarifs, mais enfin je crois qu’on fait comme tout le monde, hein. On regarde le prix en euros et puis on se rend un peu compte de ce que ça fait en francs français, donc à force on arrive à se situer par rapport à ça, mais c’est pas évident.»

Comme c'est dur de penser en euros! Ça fait presque un an qu'on est passé du franc français à l'euro, mais selon de récentes études, pour la transition dans nos têtes il reste encore du travail à faire.

80 pour cent des Français admettent qu'ils cherchent à apprécier la valeur d'un achat en revenant aux francs mentalement, selon un sondage IPSOS pour le Journal du Dimanche.

Dans les prévisions de l'Union européenne, le double affichage des prix (en euros et en francs) devait se terminer fin juin. La réalité dans les vitrines est très différente: le marquage du prix en francs à côté du prix en euros s'observe quasiment partout. Chez Nicolas le marchand de vin, par exemple:

Alors en vitrine, vous avez les prix euros et en tout petit vous avez les prix en francs parce que les gens ont quelquefois du mal à faire le rapport, même au niveau des ventes ils nous demandent toujours en terme de francs quelle était donc la valeur.

Moi je pense que il y a besoin de cette transition pour que les gens puissent se mettre des valeurs dans leur esprit, hein... même pour nous également, ça nous permet de mieux diriger notre boutique et ça nous permet également d’être beaucoup plus efficaces. Enormément de clients nous demandent encore le rapport avec les francs.

Nous dans notre esprit nous avons complètement coupé, hein. Autrement on ne pourrait plus travailler. Savoir combien fait 15 euros 20, hein... Nous nous souvenons tout à fait du prix intitial, avant, donc, 15 euros 20, ça doit valoir dans les 84 francs, 88 francs, par-là... enfin je pense, hein... Mais bon, on a quand même assez... coupé par rapport au franc et à l’euro. Mais bon, il y a toujours une clientèle qui nous demande toujours la même chose, que ça soient les anciens*, les moins jeunes ou les plus jeunes, c’est... ils ont besoin de ce repère un petit peu.

Je pense que le groupe arrêtera d’afficher les prix en francs en tout petit dans les étiquettes lorsque... peut-être à partir de l’année prochaine, hein... mais je pense qu’il fallait avoir une période de transition avant l’euro et une période de transition après l’euro, mais bon, ça va vite se résorber.

Beaucoup de consommateurs vivent aujourd'hui dans un flou sur la valeur de leurs achats. Et au bar PMU*, ce ne sont pas les demi-pressions qui sont mis en cause:

Parce que c'est arrondi, toujours au franc supérieur. Et puis on ne s'en aperçoit pas. Alors ça part plus. Alors on dépense plus mais on gagne moins. Voilà.

Pourtant, malgré la perte de repères, chez les gens qu'on a interrogés, on a remarqué très peu de regrets pour la disparition du franc. 

Ah pas du tout. Non, c’est pratique, hein, pour partir, pour voyager, pour payer en Europe, enfin, pour aller partout en Europe, c’est très très pratique.

Non, du tout*, parce que c’est assez facile finalement.

... quand on va dans un pays européen, on n’a pas de transaction à faire, pas de change à faire, pas d’argent à redonner après, donc il n’y a pas de perte. On est bien comme ça.

Je suis obligée de convertir pour comprendre que j’ai suffisamment d’argent pour acheter une baguette ou... Je sais jamais si j’ai assez, si avec 2 euros je peux encore m’acheter une baguette...

C'est embêtant alors?

Non, je pense que c’est bien. Je pense que c’est très bien mais il va falloir du temps.

Non, non, c’est pas trop difficile. C’est une question d’habitude, hein. Alors évidemment, moi je n’ai pas beaucoup d’achats à faire donc c’est plus long, mais si j’étais plus jeune, que je fasse beaucoup d’achats, ce serait assez rapide. Petit à petit, on va y venir. Il faut aller de l’avant*!

En principe je pense en euros. J’ai pas d’entraînement particulier parce que je suis dans la comptabilité et donc je suis facilité quand même.

Et chez les commerçants aussi, on remarque qu'une conversion en francs est aujourd'hui de moins en moins demandée, même si ça reste assez fréquent.

Je dirais: un sur trois ne le demande pas. L’assimilation commence quand même à se faire beaucoup plus aisément.

Les pouvoirs européens peuvent être satisfaits alors: on va dans le bon sens et chacun y met du sien*. Ça nous prend un petit peu plus de temps que prévu, c'est tout. Contents, sauf sur un point. Pour remplacer le mot 'balles' qu'on utilisait  familièrement pour parler du franc, (pour 100 cent francs on disait 100 balles), les jeunes ont trouvé un joli nom d'argot pour l'euro qui ne ferait pas forcément plaisir à Romano Prodi et à ces amis de Bruxelles: pour cent euros par exemple maintenant on dit tout simplement... 100 dollars. 

Les gens parlent du dollar, parce que ça les fait rire. Ils assimilent le dollar à l’euro en fait. Chez les jeunes, ouais, c’est assez courant...