Mieux vaut
en rire qu'en pleurer
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Telle est l'ambiance,
chaleureuse et joyeuse, de chaque soir au Pied dans le Plat. Le Pied dans le
Plat est le nom d'un restaurant ¨¤ Lyon o¨´ se donnent des spectacles d'animation
pendant le dîner. Il y a plusieurs ¨¦tablissements de ce genre partout en
France. Ici, c'est Gros Chat qui reçoit tout le monde. Il adore son m¨¦tier
d'humoriste:
«Je m'amuse beaucoup, ¨¦norm¨¦ment,
pour faire plaisir aux gens, pour donner du plaisir aux gens. C'est
important de donner aux clients, tous les soirs, donc, du plaisir et de
l'animation.»
Les dîners
spectacles sont tous tr¨¨s populaires, mais celui-l¨¤ a un style bien ¨¤ lui. Pour
le comprendre il faut revenir ¨¤ son nom «Le Pied dans le Plat», lequel
est en soi d¨¦j¨¤ tout un programme. En effet, ce restaurant est situ¨¦ dans une
cave r¨¦am¨¦nag¨¦e, ce qui permet aux artistes de faire tout le bruit qu'ils
veulent et aux spectateurs de rire aussi fort qu'ils en ont envie. Les clients
descendent donc un escalier et, pour acc¨¦der ¨¤ leurs places, ils sont oblig¨¦s
de marcher sur la grande table centrale, entre deux rang¨¦es d'assiettes. Au
bout de la table, un petit escalier permet d'en descendre pour aller s'asseoir.
On a donc vraiment l'impression de pouvoir mettre les pieds dans le plat. C'est
ce qu'on appelle de l'humour au premier degr¨¦.
Mais ce n'est pas tout.
L'expression «mettre les pieds dans le plat» signifie «intervenir
sans d¨¦licatesse dans des situations, justement, d¨¦licates». Or c'est
exactement ce que font nos artistes, disant tout haut ce que tout le monde
pense tout bas, ils commentent sans m¨¦nagement la soci¨¦t¨¦, la politique, les demandeurs
d'emploi... Ha! le fameux curriculum vitae, le CV, quelle histoire! C'est vrai
qu'en France on abuse des initiales sans toujours savoir ce que ça signifie:
«Eh bien c'est pas compliqu¨¦, au
niveau des exp¨¦riences vous avez qu'¨¤ regarder sur le papierculum et puis
voil¨¤! Pardon, mais les diplômes, les diplômes, j'ai tout! CAP, BEP et BAC...
Le bac, c'est ça, c'est pareil. Études sup¨¦rieures, mais oui! les ¨¦tudes
sup¨¦rieures, j'en ai fait, bien sûr. H.E.C, l'Ena, tout. On dit l'¨¦na, oui mais
moi, j'ai fait qu'un an, c'est l'Ena, voil¨¤. Ben oui, on va pas perdre notre
temps en babioles non plus, hein? Bon, ça y est, vous l'avez bien regard¨¦? Le
papierculum, vous l'avez bien vu? Hop, je vous l'enl¨¨ve... H¨¦ non, c'est parce
que j'en n'ai qu'un, je l'ai fait ¨¤ la main. Bon, ce qui va se passer... je
rentre chez moi. J'analyse la situation et si vous me convenez je vous
rappelle! C'est bon, on fait comme ça? Eh bien super, allez.»
Faut-il
pleurer, faut-il en rire? On h¨¦site un instant mais pas trop longtemps, il faut
l'avouer. Terry Kevin:
«L'engrenage est vite pris, on est
vite dans la drogue, parce que pour moi, la sc¨¨ne, c'est une drogue. Quand je
joue pas, je suis malade. La public est une drogue, le rire aussi est une
drogue. C'est une drogue qui fait pas mal, donc, il y en a tellement qui font
mal de nos jours que je pense que le rire ça fait du bien.»
Et que dire des
m¨¦thodes de Christian, chômeur?
«Boulang¨¨re, je suis au chômage
maintenant. J'ai tout perdu ¨¤ cause d'un agent de police. Mais c'est pas grave,
hein, Boulang¨¨re, parce que, il faut pas croire, j'ai travaill¨¦, enfin.... j'ai
essay¨¦. Mais les patrons n'ont jamais fait l'affaire. A chaque fois que je leur
demandais une lettre de motivation pour m'embaucher, ils me raccrochaient au
nez. Et il est hors de question que je travaille pour un patron qui n'a pas la
motivation.»
Et toujours et
partout, des initiales pour
donner le change*:
«Je me rappelle, il y a une
quinzaine d'ann¨¦es, il y avait les TUC, vous vous rappelez les TUC, travaux
d'utilit¨¦ collective. Apr¨¨s il y a eu le SIVP, stage d'insertion dans la vie
professionnelle. Aujourd'hui, c'est le CES, contrat emploi solidarit¨¦. Et
bientôt, ça sera la CPTTJR: cherche pas, tu trouveras jamais rien. Il faut pas
croire, je cherche du travail quand m¨ºme, hein. Oui, je cherche du travail le
vendredi; ça me donne bonne conscience pour le weekend.»
Babass nous
invite ¨¤ en rire sans arri¨¨re-pens¨¦e. Christian, c'est lui qui l'a cr¨¦¨¦, alors
il sait de quoi il parle:
«Je suis amoureux de mon
personnage, parce que il est naïf, insouciant et tout le monde l'aime bien. Je
suis content. C'est surtout une chose dont je suis amoureux, c'est quand les
gens ils rigolent. C'est pour moi l'essentiel, voil¨¤, ça c'est l'essentiel. Le
reste, je m'en fous compl¨¨tement. C'est que les gens rigolent, le reste c'est
pas important, tu vois.»
Comment
devient-on humoriste? Il n'y a pas vraiment d'¨¦cole, c'est une question de don
personnel.
«Je pense qu'il faut d'abord
¨¦crire une certaine base, et ensuite il faut tenter sa chance sur sc¨¨ne...»
C'est plutôt le sens de
la d¨¦rision qui dicte les propos des artistes, c'est la compassion pour leur
personnage, quand ce n'est pas l'admiration, m¨ºme, comme c'est le cas pour
Sandy Sims.
La jeune femme
imite ses vedettes pr¨¦f¨¦r¨¦es. Brigitte Bardot, par exemple, chantant «En Harley
Davidson», chanson ¨¦crite par Serge Gainsbourg.
Je ne reconnais plus personne en
Harley Davidson
Et si je meurs demain, c'est que tel ¨¦tait mon destin
Je tiens bien moins ¨¤ la vie qu'¨¤ mon terrible engin.
«Il y a plein de choses qui m'ont
inspir¨¦e. En fait au d¨¦part, j'ai commenc¨¦ par faire des personnages du
cin¨¦ma comme Marilyn Monroe, plus pour le physique, pour le jeu de sc¨¨ne, pour
le mythe, et puis, petit ¨¤ petit, j'ai voulu me faire plaisir, parce que c'est
vrai que Marilyn, c'est sympa, mais c'est pas une grande d¨¦monstration vocale.
Bon, donc il y a eu aussi Brigitte Bardot derri¨¨re et puis Marl¨¨ne Dietrich
aussi, et je suis arriv¨¦e ¨¤ Lisa Minnelli parce que j'¨¦tais une fan aussi. De
tous les personnages que je fais je suis fan au d¨¦part, et Lisa Minnelli pour
moi c'¨¦tait une performance, parce que bon, au niveau vocal, ça demandait quand
m¨ºme nettement plus d'efforts que Marilyn, Marl¨¨ne ou Brigitte. Donc voil¨¤, et
puis aussi le fait de pouvoir associer un petit passage claquettes, puisque
j'avais fait des claquettes dans ma vie et j'aimais beaucoup ça, donc ça m'a
permis de l'int¨¦grer puisque Lisa Minnelli en a fait, donc... voil¨¤ pourquoi je
suis arriv¨¦e ¨¤ Lisa Minnelli.
En fait, comme je vous l'ai dit,
je suis tr¨¨s fan des personnages que je fais et mon but c'est d'essayer de les
imiter au mieux possible, en fait, c'est pas de faire une parodie mais
d'essayer de faire du sosie, entre guillemets, c'est-¨¤-dire plutôt... les gens
ont r¨ºv¨¦ sur Brigitte Bardot ¨¤ l'¨¦poque, maintenant, elle a plus le m¨ºme âge,
donc on peut essayer de les refaire r¨ºver sur Brigitte Bardot ¨¤ l'¨¦poque o¨´
elle avait beaucoup de succ¨¨s. Idem pour Marilyn, elle est plus de ce monde,
donc, on a parfois envie de revoir des spectacles qu'a pu faire Marilyn, donc
c'est un petit peu le moyen de refaire r¨ºver les gens comme ça, voil¨¤.»